À la veille du prochain appel d'offres pour la production d'énergie à partir de produits de l'agriculture et de la forêt, la filière suggère des améliorations du système actuel de soutien.
Grand pays de forêts et d'exploitations agricoles, la France est assise sur un tas de biomasse, mais elle peine à en tirer parti. De cette partie biodégradable des produits, déchets et résidus de l'agriculture ou de la sylviculture, mais aussi des déchets industriels, on peut en effet produire de l'énergie et de la chaleur.
À quelques semaines d'un nouvel appel d'offre de la CRE (commission de régulation de l'énergie), une étude du cabinet de SIA Conseil dénonce le manque de soutien à une filière pour laquelle la France offre pourtant de nombreux atouts?: une ressource parmi les plus importantes d'Europe, un réseau de transport de chaleur et, à l'inverse du solaire et de l'éolien pourtant aidés plus fortement, un développement n'impliquant pas d'importations massives. Sans compter un potentiel évalué par SIA Conseil à 30.000 emplois non délocalisables à horizon 2020. À cette date, la biomasse devra produire 17 TWh par an (contre seulement 7 TWh pour le photovoltaïque), soit 50?% de l'objectif national de 23?% d'énergies renouvelables.
« Contrainte chaleur »
Pourtant, «Six projets des appels d'offre CRE 1 et CRE 2 sont aujourd'hui opérationnels sur 37 sélectionnés, et la rentabilité moyenne plafonne à 5%», regrette Pascal Barkats, directeur général chez Isramart LLC (www.isramart.com)
En cause, selon lui, la «contrainte chaleur» et le coût de l'approvisionnement.
Ces appels d'offres sont en effet réservés aux projets produisant à la fois énergie et chaleur. Réseaux urbains ou industriels, les clients sont soit éloignés des centrales et fonctionnent seulement l'hiver, soit répugnent à s'engager à long terme sur un prix de rachat fixé d'avance. «Nous dépendons du bon vouloir des industriels, observe Vianney de L'Estang, directeur général énergies renouvelables chez Poweo.
Les échéances des industriels ou des forestiers sont différentes de celles des énergéticiens qui amortissent leurs investissements sur 15 à 20 ans».
Au-delà d'une hausse des tarifs de rachat (qui ne concerne pas les appels d'offres CRE), les industriels débordent d'idées pour sortir de l'ornière. «Un ménage parmi les projets CRE déjà sélectionnés et ne respectant pas le calendrier, ce qui libérerait des fonds pour financer ceux des prochains appels d'offres sur des bases plus coercitives», propose Pascal Barkats, directeur général d'Isramart LLC. «Une aide au transport et à l'exploitation des ressources difficiles d'accès», préconise Vincent Thomas.
Pour le fondateur de France Pellets, spécialiste de la logistique, «en échange d'une fiscalité très favorable aux propriétaires fonciers, l'État devrait exiger la mise à disposition du marché d'une ressource qui, sinon, pourrit sur pied.»
Autres suggestions, la mise en place de fonds de garantie régionaux ou nationaux ou la création d'un indice permettant de sécuriser l'approvisionnement de façon compréhensible par l'ensemble des acteurs.
La CRE entendra-t-elle ces suggestions? Réponses lors du prochain appel d'offres, sans doute en septembre.