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Dans un contexte de chômage élevé, le gouvernement espère beaucoup du développement des filières de la croissance verte, qui pourrait conduire, selon ses estimations, à la création de centaines de milliers d'emplois. A l'occasion de la réunion, mardi 20 juillet, du comité de pilotage du plan de mobilisation des filières et des territoires pour les métiers de la croissance verte – qui réunit plusieurs ministères, les régions, les partenaires sociaux, Pôle emploi... –, la secrétaire d'Etat au développement durable, Valérie Létard, a présenté les principes des expérimentations qui vont avoir lieu dans cinq régions : l'Alsace, la Corse, le Nord-Pas-de-Calais, les Pays-de-la-Loire et la Réunion.
Grâce à la mise en place d'un observatoire des métiers verts, ces cinq régions vont devoir réaliser un diagnostic des besoins de chaque secteur afin d'organiser les formations et les filières. Des conventions avec l'Etat pourraient être signées dès la rentrée, espère-t-on au cabinet de Mme Létard, et des plans de formation finalisés pour juin 2011.
"SI CELA PERMET DE DOPER LE TRAVAIL, C'EST BON"
Les régions, dont la grande majorité est dirigée par l'opposition, expliquent ne pas avoir attendu "l'appel de Valérie Létard pour s'intéresser à la filière verte", ainsi que l'exprime le vice-président (Europe écologie) des Pays-de-la-Loire, Jean-Philippe Magnen. Au-delà de ce rappel de leurs prérogatives politiques et de leur volonté de garder la main sur les plans de formation, les régions envisagent favorablement cette perspective de travail en commun avec l'Etat. "Si cela permet de doper le travail sur les filières vertes, c'est bon à prendre ", reconnaît M. Magnen.
Dans le Nord-Pas-de-Calais, le taux de chômage atteint 13 % contre 10 % au niveau national, et celui des moins de 25 ans, 22 %, soit quatre points au-dessus du niveau national. Alors, pour Pierre de Saintignon, vice-président socialiste de la région, "il faut faire flèche de tout bois pour ouvrir des perspectives". La présence de nombreuses entreprises de "déconstruction électrique et électronique" a déjà permis la création d'un pôle de compétitivité autour du recyclage et du traitement des déchets. Le développement d'une filière dans cette branche paraît donc naturel. Et dans trois autres secteurs (performance environnementale des bâtiments, énergies renouvelables et transport durable), la région va développer l'offre de formation.
Les Pays-de-la-Loire envisagent aussi leur avenir économique en vert. Un regroupement d'entreprises du secteur éolien est né dans la Sarthe ; les chantiers navals de Saint-Nazaire, durement frappés par la crise, parient sur la construction de plates-formes éoliennes offshore qui permettrait de conserver 400 à 500 emplois. "Au concept de 'croissance verte', nous préférons celui d''économie verte' qui suppose un autre modèle écologique et social : il ne s'agit pas seulement de verdir la croissance ou de développer de nouvelles niches", explique M. Magnen.
"DES PROBLÈMES D'ARBITRAGE BUDGÉTAIRE COMPLIQUÉS"
Les trois autres régions concernées par l'expérimentation proposent elles aussi des pistes. L'Alsace va détecter les besoins nouveaux dans deux secteurs en particulier : l'agriculture durable et les véhicules du futur. Pour sensibiliser les lycéens, les collégiens…, la région veut créer un parcours de découverte des "lieux remarquables" sous l'angle environnemental.
La Corse, qui a déjà élaboré un dispositif de "territorialisation" du Grenelle de l'environnement, réfléchit par exemple à la diversification de l'activité des marins-pêcheurs avec le développement du "pesca tourisme", soit l'accueil de touristes sur les embarcations.
A la Réunion, quelque 500 emplois vont être dédiés à l'"embellissement" et au nettoyage des espaces. Mais, précise Tamara Raczinski, directrice de la formation professionnelle pour la région, "ce ne sont pas des nouveaux emplois mais une conversion de contrats aidés déjà financés par l'Etat".
Cet intérêt conjoint des régions et de l'Etat pour le développement de filières vertes aura un coût. "Le ministère veut accélérer, mais il n'est pas seul à décider, insiste Renault Bricq, présent pour l'Association des régions de France, lors de la réunion du 20 juillet. Il est confronté à des problèmes d'arbitrage budgétaire compliqués." Pierrette Crozemarie, pour la CGT, s'alarme : "La démarche de Valérie Létard est intéressante, mais la pénurie des moyens dans les politiques sociales et la remise en cause récente de mesures annoncées par Jean-Louis Borloo sont inquiétantes."
Rémi Barroux: Le monde